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Mémorial Acte I : acte mémorable!

Le 27 mai est une date symbolique en Guadeloupe : en effet, elle représente la commémoration de l’abolition de l’esclavage dans notre île, en 1848 plus précisément.

Le 27 mai 2008 est une date qui restera gravée dans la mémoire du peuple guadeloupéen, une journée à marquer d’une pierre blanche. En effet, sur le site de l’ancienne usine Darboussier située à Carénage, quartier populaire de Pointe-à-Pitre, a eu lieu l’inauguration du futur musée de l’esclavage ou Mémorial Acte, “centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage”, comme on pouvait lire sur les brochures disponibles hier sur le site. Ce musée ouvrira ses portes dans deux ans…

Oui. En ce jour de 160ème anniversaire de la proclamation de l’abolition de l’esclavage en Guadeloupe, Victorin Lurel, Président du Conseil Régional, a offert un présent inespéré aux descendants d’esclaves que nous sommes. Lurel a d’abord présenté son projet le 21 mai dernier à l’hotel de ville en conférence de presse. Le citoyen lambda, lui, a dû patienter jusqu’au 27 mai pour découvrir le Mémorial Acte dans toute sa splendeur. Comme on dit, nous en avions rêvé, Lurel l’a fait ! Et puis, il était temps de reprendre en main cette ancienne usine tombant en ruines. Il est vrai qu’en Guadeloupe, on est champions en sites désaffectés… Et dire que mon grand-père a travaillé à l’usine de Darboussier… C’était dans les années 30…

La journée du 27 mai a été ponctuée de faits marquants mais j’en retiendrai deux : le Mémorial Acte bien sûr mais aussi la marche qui a rassemblé une foule importante derrière une banderole sur laquelle on pouvait lire : “Mai 2008 , la Guadeloupe en marche”. Marche hautement symbolique car communautés indienne et africaine marchaient d’un même pas vers Darboussier, mettant de côté toute différence. Oui, nos deux peuples ont souffert alors pourquoi les séparer? La souffrance n’a pas de couleur me semble-t-il.

Les guadeloupéens ont répondu présents hier à l’appel de leur histoire et c’était émouvant de voir cette foule se précipiter vers le site du Mémorial. Les gens qui disent que la population n’en a cure de son passé douloureux et ne pense qu’à faire la fête ont menti. Beau pied de nez à tous ces quolibets mensongers et offensants ! Non, nous savons aussi nous intéresser à ce qui nous touche de près, à savoir l’esclavage.

S’il est une chose que je retiendrai de cette inauguration sans précédent, c’est bien l’engouement des jeunes qui ne sont autre que l’avenir de notre île. Peut-être n’auront-ils pas parcouru tous les stands et lu les affiches expliquant l’esclavage et la traite négrière dans ses grandes lignes, mais au moins ils ont participé à cette journée et c’est l’essentiel. Oui car il y avait des stands évoquant l’esclavage, des sculptures, la culture dans toute sa splendeur en fin de compte. L’on pouvait également signer le Livre d’Or et laisser des messages d’encouragements. Au dessus de mon message, il y avait un mot de soutien en anglais, preuve que ce musée drainera des communautés variées.

Avec l’érection du Mémorial Acte, c’est toute une volonté politique de faire la lumière sur notre passé figurant à peine dans les livres scolaires qui apparaît, une volonté de rétablir la vérité sur un pan peu glorieux de l’histoire de France que cette dernière a parfois du mal à assumer. Une volonté de rappeler à notre cher Président Nicolas Sarkozy que la repentance n’est aucunement exécrable mais une façon de grandir tout simplement.

Et puis, comment exiger d’un peuple qu’il avance sans se retourner s’il ne sait même pas très bien d’où il vient? Comment des blessures peuvent-elles cicatriser si elles ne sont même pas expliquées ? Dans mon édito sur Aimé Césaire, je vous faisais part de mon désir de voir notre histoire figurer dans les manuels scolaires, de mon désir de transmettre nos connaissances, notre savoir aux générations futures afin que ces dernières les partagent à leur tour avec les générations à venir… Aujourd’hui, je suis fière qu’un tel projet ait été mûri, qu’un tel projet puisse voir le jour un Guadeloupe d’autant plus que ce musée sera inédit dans la Caraibe. En effet, le Mémorial Acte sera le premier musée relatant l’histoire de l’esclavage dans le bassin caribéen si je ne m’abuse. Un vrai devoir de mémoire. C’est Aimé Césaire qui va être content…

De plus, les visiteurs présents hier ont pu avoir un aperçu de ce que sera le Mémorial Acte soit en visionnant un reportage sur ledit musée ou en admirant des panneaux montrant des maquettes impressionnantes : un site ultra moderne, un projet ambitieux et symboliquement tourné vers la mer, comme un clin d’œil à l’île de Gorée au Sénégal d’où les négriers en partance pour l’Europe prenaient le départ. Pur hasard ou volonté de la région ? Je pencherai plus pour la deuxième supputation. En effet, le site de Darboussier est idéal car comme il est indiqué sur la brochure éditée par la Région Guadeloupe évoquée plus haut, il jouit d’une “situation géographique exceptionnelle entre ciel et mer”. Tout un programme !

Et je ne parle même pas de la portée pédagogique d’un tel site pour le corps enseignant : sorties éducatives, exposés et autres. Il y aura matière à travailler avec les élèves de l’Académie. Sans compter les visites du musée en famille le week end… Quant à la portée touristique d’un tel musée, n’en parlons pas. Les guides en tout genre devront réactualiser les sites dignes d’intérêt à visiter en Guadeloupe…

Tout comme Cuba a son musée de la Révolution, la Guadeloupe aura son musée de l’esclavage et de la traite négrière, et je sens déjà que c’est un peuple tout entier qui accueillera avec ferveur le Mémorial Acte… Qui sait ? Peut-être le 27 mai 2010 ?

Kimany
Kimany
Clins d'oeil personnels, coups de projecteurs sur l'actualité nasyonal(e) et internationale... Si les éditoriaux de Kimany alimentent votre capital optimisme, son objectif principal est atteint ! #TeamGlassHalfFull :)

4 Commentaires

  1. Une très bonne initiative qui se concrétise. J’espère que sur ce site on pourra retrouver les noms des premmiers esclaves!

  2. Ce projet me fait teeeellement plaisir. M’enfin je ne dirai pas plus de peur de paraphraser mon commentaire sur l’article concernant Césaire. En tout cas, je suis très fière de voir mon île bâtir un site comme celui-ci. Les premiers dans toute la Caraïbe ? Moi je dis bravo. Je crois avoir raison d’espérer que les générations futures en sachent plus que nous ! C’est tellement important et les conséquences ne pourront être que bénéfiques.

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